ONCHE, ONCHE.
Oui doncEt heureusement. J’ai les yeux cernés.
Je dors mal. Depuis que je suis gosse. J’aimerais que quelqu’un soit
là pour me calmer quand je viens de faire un cauchemar, mais c’est à ce
moment là que je me rends compte qu’être un enfant, c’était vraiment
mieux. Plus tard c’est moi qui devrai raconter des histoires à mes
enfants pour qu’ils s’endorment, et c’est moi qui devrai les prendre
dans mes bras pour les consoler. Qui me prendra dans ses bras ? Je
devrai prendre une pilule pour dormir, parce qu’il n’y a que ça à
faire, dormir.J’ai mis du temps avant de réaliser ce que aujourd’hui j’ai réalisé,
j’ai tellement évolué, mes idées se sont développées, et elles
continuent de se développer, demain j’aurai changé d’avis, mon point de
vue sera différent. Mais mes parents ont fait comme ça et autrement.
J’ai grandi dans un contexte et pas dans un autre. Et si je peux plus
ou moins me satisfaire de ce que je suis et de ce que je peux devenir,
c’est grâce à eux et ce fameux contexte. Mais pour mes gosses, est-ce
que je saurai le faire, ce contexte ?
Est-ce que j’arriverai à ne jamais les faire rentrer dans un
supermarché pour qu’ils ne connaissent pas cet amas immonde de
consommateurs que nous sommes devenus, pour que ma fille ne voit jamais
la tête d’une Barbie, pour qu’il ne lui vienne jamais en tête que je
puisse lui offrir ce jouet fabriqué en Chine par une firme plus riche
que trois fois la France ? pour que mon fils ne veuille pas jouer avec
un faux fusil et, en visant sa sœur, hurle “pan, PAN ! ” ? Est-ce que
j’arriverai à ce qu’ils ne connaissent pas la télévision et ne soient
pas mitraillés par la publicité, la violence ?